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Ils s'usent ces engins à
deux roues. Comme le reste !
Et
pas moyen de rentrer l'argent nécessaire pour l'entretenir.
Quand on voit à la téloche
tout le fric gaspillé. Pendant que nous on galère tous les
jours comme des ploucs. Y'en a qui savent tirer les marrons du feu.
A se demander s'ils peuvent encore
se regarder dans la glace.
Et les autres qui vont bientôt
avoir le culot de nous faire des promesses pour se "sacrifier" à
s'occuper des affaires publiques !
Au bout du rouleau mon deux roues.
Je le dépose chez Dunourcau
à Mont-de-Marsan. Parce que moi, la grosse mécanique délicate,
rechercher et trouver les pièces de rechange, c'est la grosse galère.
Et puis, pendant les 3 huits (mobo-boulot-dodo), pas fastoche.
C'est beau, chez Dunourcau KMB
! Quel garage ! Et les enseignes, elle ont dû coûter bonbon.
Rien que les enseignes !
Et dire que ce sont les clients,
comme moi, qui ont financés l'outil de travail de ce propriétaire
privé !
Y'en a qui savent les tirer les
marrons du feu.
Et moi, marron !
1000 balles la facture !
Dur à digérer. Surtout
qu'en juillet, j'ai 1400 balles de revenus.
Reste 400 balles pour faire le
mois.
Heureusement que j'ai embauché
aux trois huits. En attendant la paye n'arrivera qu'aux premiers jours
d'août.
Quoi ? Vous croyez qu'il accepte
le crédit, les arrangements ? Dunourcau ?
Non ! Cash et tu reprends ton véhicule.
Sinon, t'attends d'avoir les ronds.
Ah, c'est beau ce garage ! Il jette
quand on le regarde. Mais comment il a fait toutes ces années pour
réussir un si beau garage.
6 juillet ! Il paraît que mon deux roues est réparé. Ouais ! C'est pas trop tôt. Depuis le 23 juin que je l'ai déposé. Bon ! Je n'aurai pas mes 1400 balles avant le 10 juillet. Comme d'hab' !
Faut que je trouve la somme. Non
de non !
Les prêteurs, y'en a pas
beaucoup.
Parce que les insolvables, ça
n'inspire pas.
Là, j'ai du bol. Un pote
me fait l'avance jusqu'au 10 juillet. Ah! tu penses, si je vais le rembourser
vite fait dès que j'ai les ronds. Des potes sympa, il faut les respecter.
Surtout qu'ils galèrent autant que moi.
Incroyable, d'ailleurs. Il n'y
a presque que ceux qui galèrent qui ont le coeur sur la main. Et
aussi quelques autres, remarquables, intelligents, humains, mais beaucoup
plus rares.
Et CLAC !
Je fonce récupérer
mon deux roues. Tu penses si je suis content. J'habite en pleine cambrousse.
Pas de bled sérieux à moins de 10 bornes.
Je sors du garage, pénard,
sur mon engin, joyeux, 2 bornes, 3 bornes, 4, 5 bornes, et CLAC ! le cable
d'accélateur qui pète. Ah non ! Pas ça !
1000 balles et ça pète
au bout de 5 bornes ! Ah non, alors !
Je pousse jusqu'à Leclerc.
J'attache l'engin, et je refonce chez Dunourcau. Pas content. Apparemment,
il pige vite. Il dépêche un fourgon pour aller chercher mon
engin. Non, pas tout de suite ! Où tu vas ? Non, j'attends.
Quand même, il répare
sur le champ, quand ma bécane arrive. Malgré la fin de la
journée qui approche. Ouf ! Il ne facture rien de plus. Au fond
de moi, je me dis quand même que c'est un peu normal. Non ?
Et je repars. Pauvre deux roues. Presque 60 000 bornes de bons et loyaux services.
Il était temps. Je commence
mes trois huits de boulot précaire et saisonnier, le 10 juillet.
Ah ouais, la bonne
saison, c'est pas pour moi. Les rupins, eux ils pensent aux vacances, au
soleil, aux palmiers, à se dorer la pilule. Tous les plaisirs de
la bonne saison. Les bonnes activités.
LIBERTE, EGALITE, FRATERNITE.
Bon, j'arrête, parce que
mon ciel est en train de noircir.
Galère noire !
Non, mais attends. Si je réfléchis, je suis dans la galère toute noire :
Mon porte-monnaie est délesté
de 1000 balles sur les 1400. Maintenant que j'ai remboursé.
J'ai un deux-roues pour aller au
boulot. Ok.
Il me reste 400 balles.
Il me faut 350 balles pour le carburant.
Reste 50 balles pour bouffer dans
le mois. ça, je te le dis tout de suite, c'est pas possible. Non,
c'est pas possible.
Y'a pas besoin de sortir de l'Ecole
Nationale d'Administration pour le savoir.
Bon,
je fonce. Boulot. Il reste des pâtes à la maison.
Et M.... ! 21 juillet : le "deux
roues" ne veut plus rien savoir. Un bruit d'enfer dans le carter, et il
ne démarre plus. Je contrôle tout. Arrivée d'essence,
allumage et étincelles. Rien à faire. Là, c'est grave.
Pas de la rigolade.
Nom de Zeus ! A peine 10 jours
après la sortie du mécano. Et une facture de 1000 balles....
Les boules !
Là,
y'a de quoi péter les plombs.
Tout le monde s'en fout.
Regarde-le, le monde, il continue
à tourner. Il s'en FOUT !
Et dire que je le sentais venir.
Début juin, déjà, j'en parlais lors de la convocation
par le service RMI. C'est vrai ! Il y a des surdités administratives
quasi incurables.
L'an dernier,
j'ai trinqué. Au bout du rouleau, je me suis décidé
à me bouger, et les copains de "Redevenons Moins Isolés"
ont été sollicités pour un article de fond dans Sud-Ouest.
3/4 de page avec photo. Ma trombine. Oui, ma trombine, pas loin de celle
de Jospin, de Tapie et compagnie. Remarques ! moi, rien à voir avec
ces gens-là. On se demande même comment ma trombine pouvait
se trouver dans le même journal que ces gens. M'enfin !
A croire que c'est reparti pour
un tour, cette année. Non ! On va se bouger ! Sur le champ !
Je ne sais pas faire les bafouilles,
mais y'a des survivants au RMI qui savent en faire.
Alors, coups de fil, bafouilles
(Et il faut du fric pour ces c....).
Bon sang, cette fois, on dirait
que ça bouge.
C'est ti pas beau ?
Il paraît que dans ce pays,
il y a des services publics pour aider les gens dans la galère noire.
Eh bé, là, je peux
vous dire, cette fois, je les ai vu, efficaces. C'est la première
fois que je vois ça.
ça n'a pas traîné.
Coups de fil, transport, démarches.
Bon sang !
On m'a emmené à côté
de Dax, pour louer un deux roues. Oui, oui, une salariée du service
social. Et on l'a transporté sur le champ. Avec une voiture perso,
une sorte d'espace. Un engin à 100 000 ou 150 000 Fr, tu sais ?
Bon, d'accord, les frais de déplacement
seront payés par le service social.
C'est ti pas beau ?
Bon, d'accord ! J'ai sollicité
mon patron pour avoir une avance. Le Patronat n'a pas l'habitude de jouer
les oeuvres
de bienfaisance. Pour ça, faut pas compter dessus. Quand même,
il a lâché 700 Fr que j'avais déjà gagné,
au lieu de les lâcher 10 jours plus tard.
Eh oui, caution de 750 balles à
payer. Plus 10 Fr par jour de location à la fin du mois de location.
Bon, reste le carburant du deux
roues.
Eh bé ! on m'a conduit à
une asso qui m'a avancé 200 balles par contrat écrit.
Voilà l'travail !
Je peux aller au turbin.
ça c'est une question qui
n'a traversé la tête de personne. C'est bizarre !
Les services sociaux, ils doivent
me prendre pour une espèce de robot. Tu sais, un truc en ferraille.
Un truc qui n'a pas besoin de grailler, quoi.
L'asso qui m'a prêté 200 balles, elle m'a fait signer une convention. Pour le remboursement, tiens ! Un prêt gratuit. C'est sympa, à priori. C'est pas comme les banques qui sont avides de fric pire qu'une éponge toute séche devant de l'eau. Les banques, elles arrivent même à piquer du fric à ceux qui n'en ont presque pas. Là, oui, elles sont fortes. Je pourrais vous en parler, mais j'en aurais pour trop longtemps.
Bon, la convention,
elle dit que je dois rembourser sous 1 mois, sinon ... ?
Eh bé, sinon, le tribunal,
tiens ! Qu'est-ce que tu crois ?
Et j'ai signé leur papier.
Et l'asso a signé le papier.
1 mois pour rembourser, eh oui
!
Eh oh, mon vieux, dès le premier instant, j'avais l'intention de rembourser. Puisque je vais toucher la paye, et qu'un prêt gratuit, c'est pas comme une banque, quand même.
Tu vas pas me croire. J'ai signé ce truc, le 25 juillet. Le 2 août, l'asso, elle m'écrit déjà pour me demander le remboursement dans une bafouille, quand même, pas de quoi être fier.
Il paraît qu'il y a des lois
sur les conventions écrites et signées qui doivent être
exécutées de bonne foi. Ouais, on m'a montré ça.
C'est écrit dans le Code Civil.
Ah, c'est écrit ! Faut voir
comment c'est écrit, mais ça y est. En toutes lettres.
Eh bé, l'asso d'entraide,
de solidarité, d'écoute, d'aide, de soutien, elle s'en fout
de ce qu'elle a fait signé, et de ce qu'elle a signé. Elle
veut ses 200 balles, 7 jours après les avoir prêté.
Point.
Elle s'en fout des lois de la République.
Elle veut ses 200 balles, ilico
presto !
J'ai même pas touché
la paye qu'elle les veut ses 200 balles, là.
L'asso, elle est à Aire.
18, rue du Général Labat. Je ne sais pas ce que c'est ce
truc.
C'est sûr, elle me prend
pour un bandit. Ou un débile, un des deux !
Ce que je sais, c'est que sur l'enveloppe
postée avec une machine à affranchir, c'est marqué
:
CCAS et ça veut dire "centre
communal d'action sociale".
Belle action sociale !
J'y comprend rien.
ça
craint, de nos jours !
Y'a des moments où je me
demande si tout ce beau monde se rend compte qu'il créé toutes
les conditions pour une révolution
sociale.